Dès les premières secondes de la bande-annonce de Rango 2, on ressent une ambition nouvelle, comme si Gore Verbinski et son équipe avaient décidé de repousser encore plus loin les limites de l’animation occidentale. Là où le premier film s’était déjà imposé comme une œuvre singulière, mêlant humour décalé, pastiche du western spaghetti et réflexion existentielle sur l’identité, cette suite semble embrasser une ampleur beaucoup plus vaste. La qualité visuelle frappe immédiatement : chaque grain de poussière, chaque reflet du soleil brûlant du désert et chaque plume d’oiseau est rendu avec une précision qui frôle le photoréalisme. Pourtant, la patte artistique reste très stylisée, refusant l’uniformité de l’animation contemporaine. On a presque l’impression d’assister à une peinture mouvante, une fresque désertique vivante, dans laquelle Rango continue son aventure avec cette ironie si particulière qui le définit.
Mais au-delà de la technique, c’est surtout le ton narratif qui intrigue. La bande-annonce nous plonge dans un univers où l’ancien shérif Rango, désormais figure respectée, doit faire face à une menace qui dépasse les simples bandits de grand chemin. Les dialogues esquissés laissent entendre une réflexion sur la mémoire, la légende et la manière dont un héros affronte le poids de son propre mythe. Les images de villes en plein essor, de convois ferroviaires gigantesques et de créatures étranges venues des confins du désert suggèrent une suite plus ambitieuse, presque épique. L’humour absurde, marque de fabrique du premier film, semble intact mais plus subtil, moins basé sur le simple décalage et davantage ancré dans une critique sociale et politique.
Ce qui séduit également, c’est la richesse du bestiaire. La bande-annonce dévoile une galerie de nouveaux personnages qui, chacun, possèdent une identité visuelle et sonore saisissante : une corneille mystérieuse, un tatou philosophe, une bande de coyotes mercenaires qui évoquent les desperados des vieux westerns italiens. La diversité des expressions et la fluidité des animations promettent une immersion totale. Et bien sûr, Rango lui-même conserve ce mélange irrésistible de maladresse et de bravoure accidentelle. Sa gestuelle comique, accentuée par la voix toujours décalée de Johnny Depp (version originale), offre des instants à la fois hilarants et touchants. On pressent déjà des scènes cultes, où le ridicule se transforme soudain en éclat héroïque inattendu.
Sur le plan thématique, Rango 2 semble vouloir s’aventurer dans une dimension plus sombre et plus mature. Le motif récurrent du feu et des tempêtes de sable, ainsi que des séquences où la lumière se fait crépusculaire, laissent deviner un récit sur la fin d’une ère. Le western, déjà parodié dans le premier film, se métamorphose ici en réflexion sur la modernité, sur la conquête industrielle et la disparition progressive d’un monde sauvage. On y perçoit une mélancolie proche de celle des grands classiques comme Il était une fois dans l’Ouest : le désert n’est plus seulement un décor comique, mais devient un lieu de mémoire en train de s’éteindre. Cette profondeur thématique, associée à la légèreté habituelle de l’univers de Rango, pourrait donner naissance à une œuvre hybride, oscillant entre la comédie burlesque et le poème crépusculaire.
Enfin, il faut souligner la qualité du montage et de la mise en scène de cette bande-annonce. Les plans amples sur des canyons immenses, la musique à la fois orchestrale et teintée de guitares espagnoles, les ralentis exagérés qui rappellent Sergio Leone, tout concourt à donner l’impression d’un grand spectacle cinématographique. Et pourtant, malgré cette grandeur, l’esprit irrévérencieux de Rango n’est jamais perdu : il brise le quatrième mur, trébuche en pleine course, ou improvise des répliques absurdes qui désamorcent toute solennité. Ce mélange de majesté et de dérision est précisément ce qui avait fait le succès du premier film, et qui semble revenir ici avec une intensité décuplée. Si la bande-annonce tient ses promesses, Rango 2 pourrait bien s’imposer comme non seulement l’une des suites animées les plus attendues de 2026, mais aussi comme une œuvre capable de réinventer le western pour les nouvelles générations.
